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Développement d’un protocole de présélection des mortiers de chaux pouvant procurer des datations 14C fiables (PALc)

Projet de recherche B2/202/P2/PALc (Action de recherche B2)

Personnes :

  •   BOUDIN Mathieu - Institut Royal du Patrimoine Artistique (IRPA)
    Partenaire financé belge
    Durée: 15/12/2020-15/3/2023
  • M.  ELSEN Jan - Katholieke Universiteit Leuven (KU Leuven)
    Partenaire financé belge
    Durée: 15/12/2020-15/3/2023

Description :

Les mortiers, ou plus généralement les carbonates de chaux anthropiques, sont utilisés depuis de nombreux siècles pour la construction d’éléments architecturaux. La plus ancienne utilisation connue de mortier date de la période Néolithique. Le processus de production des mortiers de chaux consiste à chauffer des roches calcaires (CaCO3) pour produire de la chaux vive (CaO) qui est ensuite mélangée avec de l'eau pour former de la chaux éteinte (Ca(OH)2) et mélangée à des agrégats (sable) pour créer un mortier. Le durcissement est dû à une réaction de carbonatation: le CO2 atmosphérique absorbé par le mortier entraîne la formation de carbonate de calcium (CaCO3), alors appelé carbonate de chaux anthropique. Ce processus de carbonatation permet théoriquement la datation radiocarbone des mortiers puisque la quantité de 14C absorbée est proportionnelle à la quantité de 14C dans l'atmosphère à un certain instant. La méthode de datation par le radiocarbone des mortiers homogènes, entièrement carbonatés et ne contenant pas de carbonates géogènes (tels que des fragments incuits de la pierre à chaux), d’impuretés calcaires provenant des agrégats (particules carbonatées tels que des fragments de coquilles) ou de dépôts de carbonates secondaires, peut être fiable et montre souvent une bonne correspondance avec les dates historiques. Cependant, dans la plupart des cas, les mortiers anciens sont fortement hétérogènes et les dates 14C obtenues ne correspondent pas aux résultats attendus. La procédure actuelle utilisée pour l'extraction du CO2 avant la datation est généralement basée sur une hydrolyse acide par étapes. On suppose que les différentes sources de carbonate se dissolvent à des vitesses différentes, bien qu'empiriquement cette hypothèse ne semble pas toujours valable.

L'objectif principal du projet PALc est de vérifier la fiabilité de la datation radiocarbone des carbonates de chaux anthropiques en développant une méthode de présélection. Le projet de recherche aidera à caractériser la composition des échantillons et son lien avec l'obtention d'une date 14C fiable.

L'approche méthodologique du projet PALc consiste en un processus minutieux allant du prélèvement à la description précise des échantillons en utilisant de multiples techniques analytiques jusqu'à la datation radiocarbone. Pour atteindre cet objectif, la caractérisation détaillée des échantillons sera reliée à la manière dont les résultats radiocarbone correspondent aux dates historiques présumées ou à la date 14C obtenue sur la matière organique (charbon de bois, fibres végétales, poils d’animaux) présente dans le mortier. Les méthodes analytiques qui seront utilisées sont complémentaires pour obtenir une large gamme de paramètres caractéristiques pour chaque échantillon. Il s'agit d'analyses pétrographiques utilisant la lumière transmise polarisée, les spectroscopies infrarouge et Raman, les analyses thermogravimétriques, la cathodoluminescence et, si nécessaire, la microscopie électronique à balayage couplée à la spectroscopie de rayons X à dispersion d’énergie. Une grande variété d'échantillons sera traitée pour obtenir une gamme de paramètres adaptés à la présélection de tout type d'échantillons dans le protocole final. Ils seront composés de divers types de liant de chaux (chaux aérienne et hydraulique), d'agrégats et d'additifs et présenteront une diversité de propriétés physiques ainsi que différents états de conservation. Leurs provenances et âges seront également diversifiés (de l’Antiquité au Moyen Âge en Belgique, en Italie, en France et en Turquie). Le protocole de caractérisation sera mis en place pour déterminer si un échantillon est apte à la datation ou non en utilisant l'hydrolyse acide par étapes. Ce protocole de présélection sera mis en oeuvre pour être le plus concis et rapide en sélectionnant les outils les plus appropriés et les paramètres déterminants pour une datation fiable des échantillons.

En définitive, ce protocole permettra un gain de temps et d'argent pour la datation radiocarbone. Le développement d'une technique de présélection pour identifier les mortiers adaptés à la datation radiocarbone sera bénéfique aussi bien pour les scientifiques du patrimoine que pour les archéologues ou les historiens de l'art puisque les analyses au 14C ne seront effectuées que sur des mortiers potentiellement datables, donnant ainsi plus de confiance aux résultats obtenus. Sur un autre plan, l'amélioration de la précision de la datation au 14C des mortiers et enduits à base de chaux issus de monuments historiques et de vestiges archéologiques contribuera à la valorisation culturelle et touristique de ces sites patrimoniaux.
Les résultats du projet seront partagés avec la communauté scientifique et diffusés par le biais de conférences et d’articles. L’impact du projet sera très significatif pour développer les capacités et les compétences futures des laboratoires des monuments et de radiocarbone de l’IRPA. Cela leur permettra d'être plus efficaces et de fournir des résultats de meilleure qualité.