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Le système belge de chômage temporaire : impacts économiques et psychologiques (BESWEP)

Projet de recherche B2/202/P3/BESWEP (Action de recherche B2)

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Description :

Cette recherche étudie l'impact du système belge de chômage temporaire sur des indicateurs économiques et psychologiques mesurés à court et à long terme. Le chômage temporaire est un instrument politique mis en place au niveau fédéral pour éviter le processus coûteux de séparation et de réembauche de travailleurs lors d'une réduction temporaire de la production et de la demande. Il peut ainsi éviter la faillite des entreprises. Du point de vue des employés, il évite le coût social du chômage et de la réintégration sur le marché du travail.

Le chômage temporaire a eu une résonance particulière pendant la pandémie de COVID-19. Au plus fort de celle-ci, en avril 2020, pas moins de 1,167 millions de personnes - soit environ 30% des salariés éligibles - ont bénéficié du chômage temporaire pour cause de coronavirus pendant au moins une journée. L’étude des conséquences à court et moyen terme du chômage temporaire sur le marché du travail est d’une grande pertinence sociétale, étant donné les implications substantielles de ce système en termes de dépenses publiques.

Notre principal objectif est d'évaluer l'efficacité du chômage temporaire d'un point de vue économique et psychologique. D'un point de vue économique, l'efficacité de ce système va nécessairement diminuer avec le temps et peut même devenir un obstacle à la reprise économique : la réaffectation des travailleurs des entreprises en déclin aux entreprises en expansion risque d'être reportée et la (ré)affectation des groupes non protégés par ce système peut être entravée par l'extension du chômage temporaire. D'un point de vue psychologique, le chômage temporaire peut avoir un côté sombre, même si ce n’est pas souhaité par les employeurs. Le chômage temporaire peut alimenter les sentiments d'insécurité d'emploi et de déshumanisation organisationnelle (sentiment d'être traité comme un instrument par l'organisation). Selon la manière dont le chômage temporaire est introduit et considéré, cela peut avoir des conséquences négatives sur la santé et le bien-être des employés, leurs attitudes à l'égard du travail et de l'employeur, et leurs comportements au travail. En outre, cela pourrait entraîner des pénalités sur la carrière des travailleurs à plus long terme.

Dans le cadre de la recherche, nous accorderons une attention particulière (1) à l'hétérogénéité entre les travailleurs (par exemple, selon le genre et l'âge) et les entreprises (par exemple, selon la taille et le secteur); (2) aux différences entre le chômage temporaire en temps « normal » et le chômage temporaire lié à la crise de la COVID 19; et (3) à l'efficacité par rapport à d'autres systèmes de chômage (par exemple, l'assurance chômage standard). S’appuyant sur une approche théorique solide en économie du travail et en psychologie du travail et des organisations, l'analyse sera basée à la fois sur des méthodes d'évaluation micro-économétriques utilisant des données individuelles administratives et sur des enquêtes longitudinales à mesures répétées. Nous visons également à intégrer les deux perspectives disciplinaires dans certaines questions de recherche spécifiques, en particulier celles qui étudient les effets du chômage temporaire sur les trajectoires des travailleurs sur le marché du travail. Dans la phase finale de la recherche, nous rassemblerons les résultats des deux disciplines et la littérature existante. Sur la base de cette vision intégrée, nous formulerons des lignes directrices pour la conception de la politique en matière de chômage temporaire en Belgique.

En analysant directement l'efficacité d'une mesure politique qui n'a jamais été évaluée dans le contexte belge, ce projet de recherche présente un intérêt évident pour les décideurs, les autres parties prenantes et la société dans son ensemble. Un très grand nombre de salariés ont bénéficié du régime de chômage temporaire Corona pendant la crise, soutenu par des ressources publiques considérables. En fournissant des résultats scientifiques sur les avantages et les risques potentiels associés au chômage temporaire, notre recherche contribue au débat sur l'efficacité de cette forme de soutien aux entreprises et aux travailleurs en temps de crise. Dans le cadre de la partie psychologique du projet, une attention particulière sera accordée à la santé et au bien-être des travailleurs. Cela a une résonance particulière en temps de crise, quand les travailleurs se sentent stressés, avec les risques bien connus pour leur santé mentale et physique. En outre, en interprétant nos résultats en relation avec la littérature scientifique internationale, le décideur n'est pas seulement informé de l'efficacité de la version belge du chômage temporaire, mais aussi des implications d'une conception particulière de la politique. Les études scientifiques nationales et internationales sur le sujet permettent de dépasser le débat idéologique et facilitent la prise de décision démocratique.

Dans la recherche, nous cherchons à obtenir une vision équilibrée des impacts et processus mesurés. Les effets en matière d'emploi ont fait l'objet d'une grande attention dans la littérature économique sur le chômage temporaire. Bien qu'extrêmement importants, ces résultats négligent la qualité de l'emploi (par exemple, le niveau de revenus ou le degré de sécurité d'emploi), la qualité des relations travailleur-employeur (par exemple, le soutien organisationnel par rapport à la déshumanisation organisationnelle), les conséquences associées aux carrières durables et, en fin de compte, le bien-être des travailleurs. Sur cette base, le projet explorera une lacune dans la littérature scientifique internationale sur l'efficacité des régimes de chômage temporaire en combinant les évaluations économiques de la politique avec l'évaluation de ses impacts psychologiques. Le point de vue psychologique impliquera un certain degré d'innovation dans la production de nouvelles données sous la forme d'enquêtes longitudinales permettant le suivi de travailleurs ayant fait l'expérience du chômage temporaire par rapport à des travailleurs non affectés, à des chômeurs ou à des travailleurs sur contrat temporaire.

Nous organiserons des séminaires pour présenter et discuter de nos résultats à toutes les parties prenantes concernées : le ministre national responsable et son administration, les partenaires sociaux, les administrateurs des institutions d'assurance sociale chargées de la mise en œuvre du chômage temporaire, et les membres de la communauté scientifique. Nous prévoyons également de diffuser nos résultats à un public plus large en Belgique et à l'étranger. Nous résumerons les résultats d'une manière non technique et les publierons dans des revues de vulgarisation scientifique en économie et dans des magazines à grand tirage en psychologie.