NL FR EN
www.belgium.be

Synthèse et mise en forme de matériaux inorganiques avancés via une approche “bottom-up” à l’échelle nanométrique

Projet de recherche P6/17 (Action de recherche P6)

Personnes :

Description :

A cause de leurs propriétés très spécifiques, les matériaux inorganiques jouent un rôle essentiel en tant que composants de nombreux appareils et équipements, et il est difficile de leur trouver des remplaçants. Afin que les propriétés d’un instrument soient adaptées à sa fonction, une bonne connaissance de la corrélation entre propriété et microstructure est requise. Parce que la microstructure dépend elle-même du procédé de synthèse, la maîtrise des méthodes de préparation est décisive pour le développement de nouveaux matériaux. Alors que la plupart des applications sont clairement identifiées, les chercheurs en science des matériaux poursuivent leurs efforts pour développer de nouvelles approches qui permettent de produire des composants de forme complexe et de haute fiabilité avec un coût minimal en énergie et en matières premières.

L’objectif du projet et son originalité résident dans le fait que de nouvelles voies de synthèse seront développées à l’échelle nanoscopique pour fabriquer des matériaux inorganiques avancés. Dans ce contexte, ce projet se focalisera sur la mise en œuvre de nouvelles routes pour la fabrication « near-net shape » de tels matériaux, afin de fabriquer des composants de haute fiabilité à des coûts acceptables, et avec une dépense énergétique minimale. Les travaux à réaliser comprennent tant des aspects fondamentaux, à savoir la compréhension et le contrôle des phénomènes impliqués dans la synthèse des précurseurs (« briques de construction »), que des aspects plus appliqués, liés à leur transformation en matériaux de forme donnée. La synthèse implique l’organisation spontanée et éventuellement réversible de petits blocs unitaires dans le but d’obtenir, par agglomération, une structure de plus grande taille. Les matériaux seront d’abord définis à l’échelle nanométrique par l’utilisation de précurseurs moléculaires multimétalliques de nature bien définie, selon une approche « bottom-up » partant du niveau moléculaire, en présence ou non de systèmes ordonnés à l’échelon nanoscospique, offrant de nombreuses opportunités pour la conception de systèmes fonctionnels complexes par auto-assemblage ou effet de matrice (« template »). Contrairement à une perception largement répandue mais incorrecte, il reste beaucoup à faire aussi bien en matière de compréhension fondamentale des processus impliqués, que pour le contrôle de l’assemblage des particules, de la structuration, du frittage rapide, de la mise au point de « prototypes », et de la densification de systèmes de forme complexe et de matériaux composites. L’organisation des blocs unitaires à l’échelle de plusieurs longueurs de liaison est un défi crucial pour la conception des matériaux avancés. Depuis le niveau moléculaire jusqu’au niveau macroscopique, les chemins de synthèse suivent différentes voies partant de la solution et allant jusqu’à la préparation et la mise en œuvre de poudres. Pour faire face à ce défi, nous proposons également de nous inspirer des processus biologiques couramment mis en œuvre dans le milieu naturel.

Des processus de synthèse seront développés pour fabriquer les particules requises à l’échelle (sub)nanométrique, et l’assemblage et/ou la densification des particules sera contrôlée pour atteindre les caractéristiques recherchées. La recherche sera subdivisée en 7 sections (« Work package ») :

WP1 : L’état de « gel » : aspects fondamentaux et applications
WP2 : Procédés de synthèse de films minces au départ de solutions et de précurseurs
WP3 : Synthèse de poudres à l’échelle nano- et micrométrique
WP4 : Méthodes sèches et humides de mise en forme incluant la mise au point de prototypes
WP5 : Densification (échelle nanoscopique, matériaux composites, formes complexes, nouvelles approches)
WP6 : Structuration, effet de matrice, auto-assemblage et concept biomimétique
WP7 : Nouvelles méthodes de caractérisation et d’imagerie

Les matériaux cibles (principalement oxydes, carbures, nitrures) issus de cette nouvelle technologie sont les suivants :
- des matériaux obtenus par nano-déposition pour le recouvrement et la mise en forme de composants multifonctionnels (piles à combustible, batteries, membranes, catalyseurs, senseurs optiques, magnétiques et chimiques, matériaux de stockage de gaz,…)
- des matériaux de forme complexe « intégrables » (« hot structures », abrasifs, architectures biomimétiques,…)

WP 1 et 2 se concentreront sur le développement et l’utilisation de gels précurseurs pour promouvoir la formation de matériaux « faits sur mesure » par hydrolyse et condensation contrôlées d’agents formateurs de réseaux présentant des fonctionnalités spécifiques. Quelque soit le produit final, poudre ou film mince, l’extension des méthodes sol-gel classiques à base de précurseurs de Si ou de Ti à des combinaisons multimétalliques nécessitent l’apport de nouvelles connaissances. Il est en effet indispensable d’approfondir la compréhension au niveau thermodynamique, théorique et structural, via la détermination des constantes de stabilité des complexes métalliques dans le gel, la modélisation des structures présentes dans un réseau poreux tridimensionnel, l’établissement de relations entre la composition chimique du gel et les caractéristiques (structurales, texturales, composition) du gel décomposé, les analyses tomographiques et texturales par spectroscopies RX et microscopie électronique à transmission. En particulier quand un film mince est requis pour une application, les processus physico-chimiques qui sous-tendent la formation du film doivent faire l’objet d’études fondamentales, afin de comprendre comment la maîtrise d’outils chimiques (modification des propriétés de surface du substrat, mouillabilité des liquides, utilisation de stimuli externes pour améliorer la formation du film et/ou assurer une organisation locale…), permet d’influencer les mécanismes de croissance des films et leur organisation à l’échelle moléculaire.

WP 3, 4 et 5 portent sur la fabrication et la mise en forme de poudres, soit directement par compactage et densification, soit par un traitement humide à l’état colloïdal, dans lequel des petites particules en suspension sont agglomérées en rangées homogènes ordonnées. Une méthode douce de densification sera développée par la modélisation du compactage pour différentes distributions de formes et tailles de particules dans la poudre, en choisissant de la sorte les paramètres granulométriques et morphologiques les plus adaptés pour la poudre de départ. De nouvelles technologies de frittage seront mises en œuvre et étudiées (comme le frittage par micro-ondes, sous courant électrique pulsé, par dispersion de plasma), afin d’améliorer les propriétés finales du matériau. Une approche similaire sera suivie pour la mise en forme de particules dans une suspension par le biais du dépôt électrophorétique. Un intérêt particulier sera accordé à l’utilisation de particules de taille bien définie comme précurseurs pour l’ingénierie de nouvelles structures. Les interactions entre particules peuvent être suivies par une combinaison de traitements de surface, du choix du solvant, ou de l’addition d’autres matériaux tels que des molécules non-adsorbantes, ou la mise en œuvre de contraintes externes (champ magnétique, dépôt sur des surfaces structurées,…). Cette stratégie permettra de moduler le comportement des particules afin d’exercer un contrôle sur la nature des structures résultantes. Ceci correspond à l’approche d’ « assemblage dirigé ». Des stratégies seront également mises en œuvre pour préparer des poudres avec des stoechiométries déterminées et des caractéristiques chimiques, structurales et texturales bien définies, en vue de leurs applications potentielles. Par exemple, de nouvelles routes basées sur l’utilisation de composés de coordination homo/hétérométalliques comme précurseurs, ou sur le concept de nanoréacteur pour la fabrication de nanoparticules multifonctionnelles, seront étudiées.

WP6 porte sur le développement de stratégies, principalement inspirées du milieu naturel, orientées vers la synthèse d’architectures inorganiques complexes. Parmi les nouveaux outils qui seront mis en œuvre dans cette optique, on peut citer : (i) la « transcription », qui utilise des structures moléculaires pré-organisées ou auto-assemblées, comme matrices pour l’élaboration d’un matériau, (ii) « l’assemblage synergique » correspondant au co-assemblage de précurseurs moléculaires avec un matériau dans le cadre d’un effet de matrice « in situ », (iii) la « morphosynthèse », utilisant des transformations chimiques dans des environnements confinés (micelles, microémulsions,…), (iv) la « synthèse intégrée », qui combine toutes les méthodes précédentes pour produire des matériaux hiérarchisés, et finalement (v) « l’auto-génération », dans laquelle le contrôle des conditions environnementales comme dans le milieu naturel permet la génération spontanée de structures hiérarchisées hautement sophistiquées avec une composition chimique bien définie. La clef de voûte de ce volet de recherche réside dans l’élucidation des concepts fondamentaux de chimie inorganique et des principes de construction utilisés par la nature pour proposer des matériaux plus fiables, plus efficaces, et plus respectueux de l’environnement.

A chaque fois que cela sera possible, toutes les méthodologies mises en œuvre dans les WP’s seront renforcées par un suivi continu des différents phénomènes se succédant au cours de la synthèse et de la mise en forme. WP7 portera donc aussi sur le développement et l’utilisation de techniques non conventionnelles d’imagerie pour sonder l’assemblage des entités impliquées (molécules, ions complexes, particules, agglomérats,…) et leurs interactions, jusqu’au stade du matériau final. Des images résolues dans le temps et en température des phénomènes impliqués dans la transformation des précurseurs en produit final seront accessibles grâce aux spectroscopies chimiques, morphologiques et structurales spécifiquement dédicacées aux matériaux propres à chaque partenaire. La mise à disposition de ces outils d’imagerie aux autres partenaires du consortium sera une priorité.

Notre objectif est donc focalisé sur la mise en évidence des connaissances fondamentales et appliquées nécessaires à l’obtention de matériaux inorganiques avancés avec une consommation énergétique minimale, par l’interconnexion d’étapes pour lesquelles tous les partenaires du réseau possèdent des réponses partielles. Le projet rassemble des spécialistes de plusieurs domaines de la science des matériaux, possédant une expertise confirmée et reconnue à l’échelon international. En outre, en inscrivant fermement la chimie au cœur des efforts, cette recherche sera développée et stimulée dans les domaines qui sont traditionnellement la partie la plus faible dans les projets apparentés portant aussi sur la matière condensée. Ainsi donc, nous espérons développer un chemin thermodynamiquement favorable qui bénéficie de l’inspiration des matériaux biologiques, de la modélisation théorique, des nouvelles méthodes d’analyse et de frittage, et, en réalité, du développement de toute la physico-chimie des procédés de « chimie douce en solution ».

Documentation :