Projet de recherche SE/D3/02 (Action de recherche SE)
Ces dernières années, l'Etat fédéral s'est penché sur l'administration de la justice pénale. Les dysfonctionnements des appareils policier et judiciaire, d'abord, le souci prépondérant de pallier les insuffisances de l'approche répressive face à une crise du lien social et du rapport à la norme ensuite, ont favorisé la mise en place de nouvelles politiques publiques de prévention pour lutter plus efficacement contre la "petite délinquance", le sentiment d'insécurité et l'exclusion sociale.
A la différence de certains pays, et pour des raisons socio-historiques qui lui sont propres, l'Etat fédéral a inscrit d'emblée les nouvelles politiques locales de prévention dans la structure socio-spatiale des entités urbaines sous le signe dominant de la lutte contre le sentiment d'insécurité. Cette orientation a favorisé l'éclosion d'un champ "socio-pénal", nourri d'acteurs et de dispositifs novateurs, qui érige la police communale en acteur central d'une prévention "globale et intégrée" s'appuyant tant sur les appareils de la réaction pénale que sur les acteurs de la prévention sociale ou socio-médicale.
Le sentiment d'insécurité, qui oriente aujourd'hui nombre de nouveaux dispositifs repérables dans le champ socio-pénal, doit être interrogé et problématisé. Associé à la "petite délinquance", il relève aussi d'un ensemble diversifié de phénomènes, parmi lesquels la fragilité socio-économique et socio-affective, la précarité des réseaux de sociabilité primaires, la nature des relations entre menacés et menaçants, la nature des expériences avec les agents de la régulation sociale ou pénale, ou encore la distance vécue avec la représentation politique... De même, les nouveaux dispositifs mis en place pour lutter contre le sentiment d'insécurité, la désagrégation du lien social et l'exclusion doivent être étudiés, tant en ce qui concerne leurs objectifs de prévention, de restauration et de sécurisation qu'en regard de possibles effets "pervers" en termes de discrimination, d'exclusion, ou d'accentuation des tensions entre groupes vulnérables.
La recherche est structurée autour de l'analyse d'expériences concrètes de mise en oeuvre des dispositifs socio-pénaux. En mobilisant une large palette d'expériences à caractère social et à caractère pénal, les chercheurs ont étudié les effets de ces dispositifs sur les trajectoires sociales et pénales individuelles, sur les interactions entre populations menacées, populations menaçantes et agents de régulation. L'impact de la territorialisation des nouveaux dispositifs de prévention, l'expérience de l'insécurité pour différents groupes de population vulnérables en milieu urbain et la mise en oeuvre des pratiques socio-préventives et socio-pénales à l'égard des usagers de drogues constituent à cet égard autant de volets privilégiés par la recherche.
En interrogeant les effets des nouveaux dispositifs socio-pénaux sur les interactions des populations menacées, des publics menaçants et des agents de régulation sociale, la recherche a fait progresser la problématisation du sentiment d'insécurité et de son lien avec les processus d'exclusion sociale. Dans la foulée, elle vise à donner aux pouvoirs publics les moyens d'ajuster les dispositifs existants pour diminuer le sentiment d'insécurité en contribuant à la lutte contre l'exclusion et la discrimination sociales.
Réponses à l'insécurité: des discours aux pratiques
Van Campenhoudt, Luc - Cartuyvels, Yves - Digneffe, Françoise ... et al. Bruxelles: Editions Labor, 2000 (PB5588)
Références bibliographiques :
