Les informations qui suivent sont fournies à titre purement indicatif. Seuls les textes législatifs et réglementaires en vigueur font foi.
La Belgique s'est dotée d'une législation spécifique aux activités spatiales opérationnelles en 2005 (loi du 17/09/2005 relative aux activités de lancement, d'opération de vol ou de guidage d'objets spatiaux). Cette loi a été la première d'une "nouvelle vague", après celle des premières lois historiques (Etats-Unis, Russie, Inde, Royaume-Uni, Suède, etc.) et avant les lois de plusieurs Etats européens (France, Pays-Bas, Autriche, Danemark, Finlande, etc.).
La loi de 2005 a été révisée en 2013 afin de prendre en compte le cas particulier des objets non-manœuvrables en orbite. Dans un tel cas, la loi identifie l'opérateur comme la personne ayant conclu le contrat aux termes duquel l'objet est lancé selon des paramètres orbitaux déterminés.
En 2008, le Roi a pris un arrêté d'exécution de la loi (arrêté royal du 19/03/2008 portant exécution de certaines dispositions de la loi du 17/09/2005 relative aux activités de lancement, d'opération de vol ou de guidage d'objets spatiaux). Cet arrêté a été remplacé par un arrêté du 15/03/2022 entré en vigueur le 12/05/2022.
On dit souvent de la Belgique qu'elle est la plus grande des petites puissances spatiales européennes. Avec un investissement public annuel de 250 millions d'euros dans la recherche-développement spatiale à travers la coopération européenne ou internationale, la Belgique a "pris son envol à bord du vaisseau ESA" dès le début des années 1960. Etat membre fondateur de l'Agence spatiale européenne et de ses prédécesseurs (ESRO, ELDO), ainsi que d'autres organisations telles qu'EUMETSAT, la Belgique a investi dans la recherche et le développement coopératifs de manière continue, durant plusieurs décennies. Cet investissement lui a permis d'atteindre la capacité industrielle de concevoir et de développer de petits satellites : ce fut le cas de PROBA-1, lancé en 2001, et de ses successeurs, PROBA-2 (2009), PROBA-V (2013) et PROBA-3 (prévu pour 2023). Si la conception et la fabrication de ces satellites étaient placées sous maîtrise d'œuvre belge, les missions associées restent des missions ESA.
Avec l'essor des programmes spatiaux institutionnels européens, les organisations, publiques ou privées, susceptibles d'entreprendre des activités tombant dans le champ d'application de la loi se sont multipliées.
En 2014, la Belgique a connu sa première activité nationale, menée par une organisation non-gouvernementale. Entre 2014 et 2020, six activités ont été autorisées et 36 objets ont été immatriculés conformément à la loi spatiale belge. Et ce n'est pas terminé : de nouvelles activités sont en cours de préparation...
La loi spatiale permet à la Belgique de se conformer à ses engagements dans le cadre des cinq traités des Nations Unies sur l'espace extra-atmosphérique, auxquels elle est partie. Plus encore : la loi est l'instrument de mise en œuvre des normes ou des recommandations d'ordre international, comme les résolutions et lignes directrices émanant des Nations Unies et qui répondent à la nécessité d'encadrer les activités spatiales et leur évolution. Dans cette optique, la Belgique fait le choix de ne pas édicter des normes qui lui seraient propres, mais de s'aligner sur les standards et les références reconnus aux plans européen et international.
Le phénomène NewSpace se manifeste bien évidemment en Belgique avec l'émergence de nouveaux acteurs exploitant les technologies de pointe et proposant des solutions flexibles à moindre coût.
BELSPO a intégré cette force vive dans sa politique de soutien à la R&D spatiale, notamment par sa participation à des programmes-cadres destinés à servir d'incubateur à de petites missions et à de nouveaux acteurs industriels.
Il en a été de même dans la régulation des activités spatiales et ce, dès 2005. Ainsi la loi spatiale, complétée par son arrêté royal d'exécution, propose un cadre propice à l'accueil et au développement de petites et moyennes entreprises, avec:
Le système de la loi spatiale belge permet en outre une approche adaptée à chaque activité et à ses spécificités, tout en garantissant un traitement égalitaire des opérateurs et le respect des normes reconnues au niveau international. Ce système s'est révélé efficace en permettant l'autorisation et la supervision d'activités variées, menées tantôt au niveau national, tantôt dans le cadre de coopérations internationales étendues. Il s'est distingué par sa flexibilité et sa réactivité aux besoins spécifiques de chaque opérateur, tout en garantissant un niveau de sécurité et de qualité conforme aux standards internationaux.
La loi belge, complétée par son arrêté d'exécution, répond aux préoccupations et aux enjeux actuels:
Qu'est ce qui change avec l'arrêté royal de 2022 ?
(1) rôle de BELSPO
L'arrêté spécifie le rôle de BELSPO dans la mise en œuvre de la procédure et dans la préparation du dossier pour le membre du Gouvernement en charge de délivrer l'autorisation. Le système précédent par lequel le membre du gouvernement compétent pouvait faire appel à un comité d'experts a été abandonné : cette possibilité n'avait jamais été activée et s'était révélée assez lourde à mettre en place.
La mission de BELSPO dans la mise en œuvre de la loi de 2005 et de l'arrêté royal de 2022 est à distinguer de celle de gestionnaire du soutien public à la recherche spatiale dans le cadre international. Ainsi, le fait que BELSPO alloue un financement, direct ou indirect, à une activité n'implique pas nécessairement que cette activité sera autorisée par le membre du Gouvernement compétent lorsqu'elle atteindra sa phase opérationnelle.
(2) Expertise technique (ESA)
L'appui en expertise technique est prévu dans le cadre du traitement du dossier. Un tel appui pouvait déjà être demandé par le membre du gouvernement compétent auprès d'une institution belge, étrangère (ex.: agence spatiale nationale) ou internationale (ex. ESA), sur base du dossier soumis par le demandeur. En pratique, BELSPO et l'ESA ont conclu un accord encadrant la fourniture de cette expertise sur requête du membre du Gouvernement compétent.
Avec le nouvel arrêté, l'appel à l'appui en expertise technique devient obligatoire pour les objets de "classe U", c'est-à-dire les cubesats. Etant donné que le coût de cette expertise est à charge du demandeur, il est prévu que celui-ci reçoive une estimation de ce coût et qu'il puisse, s'il le juge préférable, retirer sa demande sans frais.
Cette obligation de recourir à l'appui en expertise technique ne s'applique toutefois pas:
(3) transfert d'immatriculation
La loi de 2005 organisait déjà la possibilité d'un transfert d'activité en orbite, mais uniquement du point de vue de l'autorisation et de la supervision. Une nouveauté importante de l'arrêté royal de 2022 est la possibilité d'effectuer un transfert, actif ou passif, d'immatriculation entre la Belgique et un autre Etat de lancement de l'objet. Un tel transfert peut intervenir sur base d'un accord international ou suite à une cession d'activité en orbite.
Le transfert actif, c'est-à-dire lorsque la Belgique a immatriculé un objet qui doit être immatriculé par un autre Etat, requiert que cet autre Etat soit lui-même Etat de lancement de l'objet au sens de la Convention des Nations Unies du 14 janvier 1975 sur l'immatriculation des objets lancés dans l'espace extra-atmosphérique. Ce transfert prend la forme d'un arrangement avec les autorités compétentes de l'Etat reprenant l'immatriculation de l'objet, accompagnée d'une radiation de l'inscription de l'objet du registre belge des objets spatiaux.
Le transfert passif, c'est-à-dire lorsque la Belgique immatricule un objet déjà immatriculé par un autre Etat, requiert que la Belgique soit Etat de lancement de cet objet au sens de la Convention des Nations Unies du 14 janvier 1975 sur l'immatriculation des objets lancés dans l'espace extra-atmosphérique. Il faut en outre que l'Etat primo-immatriculant s'engage à radier l'inscription de l'objet de son registre. En outre, lorsque l'activité impliquant l'objet est menée par une entité non-gouvernementale, l'activité doit répondre à l'un des critères fixés par l'art. 5, §2, de l'arrêté royal.
Il est important de distinguer le transfert d'immatriculation, le transfert d'activité et le transfert de propriété. Il s'agit de trois opérations distinctes, même si elles peuvent être connexes.
(4) utilisation durable et rationnelle des ressources spatiales
L'arrêté royal de 2022 précise également le contenu de l'étude d'incidence initiale à réaliser et à soumettre par le demandeur. Celle-ci intègre désormais, dans la troisième partie de cette étude, les mesures prises pour assurer l'utilisation durable et rationnelle des ressources naturelles du milieu spatial.
(5) immatriculation des objets lancés par des entreprises privées
L'immatriculation d'un objet spatial a une double fonction:
Jusqu'à l'entrée en vigueur de l'arrêté royal de 2022, il n'existait pas de base juridique permettant à la Belgique d'immatriculer un objet lancé sur ordre d'une entité belge non-gouvernementale. La plupart des objets lancés ayant bénéficié d'un (co)financement public, il était considéré que l'Etat belge avait participé au moins implicitement à l'ordre de lancement de l'objet, permettant ainsi de l'inscrire au Registre national des objets spatiaux. Cette pratique arrivait néanmoins à ses limites, étant donné l'apparition d'activités entièrement financées par l'industrie.
Le Roi a donc défini trois critères alternatifs pour identifier les objets lancés sur ordre d'entités non-gouvernementales belges et dont l'immatriculation est de la responsabilité de l'Etat belge. Il s'agit:
Il est également prévu que, conformément à la Convention des Nations Unies de 1975 précitée, le Gouvernement belge peut conclure des accords ou des arrangements avec un autre Etat de lancement de l'objet, stipulant que cet autre Etat sera en charge d'immatriculer l'objet conformément à ladite convention.
(6) protection des données personnelles
Suite à l'entrée en vigueur de la réglementation européenne pour la protection des données à caractère personnel (RGPD), le Roi a adapté les règles de traitement des informations et des données personnelles dans le cadre des procédures d'autorisation et d'immatriculation.
S'il reste indispensable de collecter des données individuelles relatives à des personnes physiques, notamment afin de s'assurer de la qualification des personnes impliquées dans l'activité, ces données ne sont plus reprises dans le dossier tel que publié en ligne. Ceci correspond à une pratique déjà adoptée par BELSPO pour les dossiers antérieurs à l'entrée en vigueur de l'arrêté royal de 2022.
La conservation des données à caractère personnel par BELSPO est limitée dans le temps en fonction de la durée de la présence de l'objet en orbite terrestre. Une fois tout risque lié à sa présence en orbite, à sa rentrée atmosphérique ou à sa retombée au sol disparu, les données à caractère personnel liée à l'activité sont effacées.
Il est à noter que la collecte de données relatives à des personnes physiques au titre de la loi de 2005 est, dans les faits, limitée.
(7) Système d'alerte
La loi confie au Roi le soin de désigner le centre de crise en charge de la gestion des situations découlant d'un dysfonctionnement d'un objet opéré sous responsabilité de la Belgique. Depuis 2008, cette tâche est confiée au Centre de crise national (SPF Intérieur) (Ce type de situations est à distinguer de celui impliquant des objets spatiaux étrangers qui menaceraient de s'écraser sur le territoire belge.)
En cas de dysfonctionnement d'un objet spatial sous responsabilité de la Belgique qui affecterait son opération en orbite et qui générerait un risque de collision avec d'autres objets spatiaux ou de retombée à la surface terrestre, le Centre de crise national communique sans délai au membre du Gouvernement compétent, ainsi qu'à BELSPO, les informations et données reçues et se coordonne avec les autorités étrangères et les instances internationales compétentes afin de prévenir tout dommage.Tout d'abord, il est essentiel d'intégrer dès le début du projet d'activité les contingences liées à l'autorisation. A ce titre, il faut tenir compte:
Ensuite, vous pouvez :
Toute information complémentaire relatives à la loi, à l'arrêté royal et à leur mise en œuvre peut être demandée à:
Jean-François MAYENCE
BELSPO
+32 (0)2 238 35 17
jean-francois.mayence@belspo.be
A titre strictement indicatif et explicatif, sans préjudice des définitions normatives données par la loi ou par les règlements applicables, on entend par:
Activité: ensemble d'actes et d'interventions accomplis sous l'autorité d'une personne pour assurer le vol dans l'espace d'un ou de plusieurs objets.
Autorisation: un arrêté ministériel, pris sur base de la loi de 2005, et octroyant à son titulaire le droit de mener une activité déterminée, conformément à la loi et, le cas échéant, à des conditions imposées par le Roi ou par le membre du Gouvernement compétent. L'autorisation peut être suspendue ou retirée dans les cas prévus par la loi. L'autorisation peut porter sur plusieurs objets et même sur plusieurs lancements effectués pour une même finalité.
Contrôle effectif: le fait d'exercer sur l'activité l'autorité ultime de décision. Le contrôle effectif n'implique donc pas nécessairement la capacité d'activer les moyens techniques d'opération de l'objet dans l'espace. Dans le cas d'un objet non-manœuvrable une fois mis à poste, le contrôle effectif est réputé être exercé par la personne qui a déterminé de sa propre volonté les paramètres orbitaux de l'objet et qui a conclu le contrat de service de lancement sur cette base.
Etat approprié / Etat de lancement / Etat d'immatriculation: Ces trois notions doivent être distinguées.
Etat de lancement : l'Etat de lancement est tout Etat qui remplit au moins un des critères suivants:
Etat approprié: l'Etat approprié est celui qui est responsable de l'autorisation et de la supervision continue de l'activité. La qualité d'Etat approprié est donc liée à l'activité (par le lieu où elle est menée ou par la nationalité de la personne qui la mène) et non à l'objet.
Etat d'immatriculation: l'Etat d'immatriculation de l'objet est obligatoirement l'Etat de lancement de l'objet ou, dans le cas où il y a plusieurs Etats de lancement de l'objet, l'un de ces Etats déterminé de commun accord entre eux. L'Etat d'immatriculation est celui qui exerce la juridiction et le contrôle sur l'objet. Il est possible que l'Etat d'immatriculation soit différent de l'Etat approprié.
Objet spatial: tout engin manufacturé lancé ou destiné à être lancé sur une orbite terrestre ou au-delà. Par extension, tout engin lanceur d'un objet spatial est lui-même un objet spatial.
Immatriculation: inscription d'un objet au Registre national des objets spatiaux en lui attribuant un désignateur et en indiquant les données associées à l'objet (propriétaire, fréquences radio, mission, etc.). L'immatriculation a pour effet de soumettre l'objet à la juridiction et au contrôle de l'Etat belge. L'initiative de l'immatriculation appartient au membre du Gouvernement compétent.
Notification de l'immatriculation: communication, par BELSPO au Bureau des Nations Unies pour les Affaires spatiales (UNOOSA), de l'immatriculation d'un objet par la Belgique. L'immatriculation est alors reprise au Registre international des objets spatiaux. L'objet reçoit un désignateur international selon les normes COSPAR.
Résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies: ces résolutions revêtent un engagement politique fort pour les Gouvernements des Etats membres qui les ont adoptées, mais ne sont juridiquement pas liantes. En matière spatiale, plusieurs résolutions de l'AGNU ont été adoptées pour les principes de coopération internationale dans des domaines spécifiques (notification des activités spatiales - 1961, exploration et utilisation de l'Espace - 1963, télévision par satellite - 1982, télédétection - 1986, sources d'énergie nucléaire - 1992, bénéfices de l'utilisation de l'Espace - 1996). D'autres résolutions ont énoncé des recommandations sur des questions spécifiques (utilisation de l'orbite géostationnaire - 2000, concept d'Etat de lancement - 2004, pratiques d'immatriculation - 2007, lois spatiales nationales - 2013). A côté de ces résolutions ad hoc, des principes, des recommandations et des lignes directrices ont également été adoptés au niveau du Comité des Nations Unies pour les Utilisations pacifiques de l'Espace extra-atmosphérique et entérinés par l'Assemblée Générale des Nations Unies (débris spatiaux - 2007, sources d'énergie nucléaire - 2009, viabilité à long terme des activités spatiales - 2020)
Responsabilité internationale pour dommage: obligation de droit international qui s'impose aux Etats de réparer le dommage causé par un objet spatial dont ils sont Etat de lancement.
Deux cas de figure sont à distinguer:
La responsabilité internationale pour dommage est donc uniquement imputable à un Etat, par un autre Etat. Les particuliers victimes du dommage doivent s'adresser à leur Gouvernement pour que celui-ci active, s'il le juge opportun, ce mécanisme de réparation. La loi de 2005 prévoit un recours de l'Etat belge contre l'opérateur lorsque l'Etat belge est tenu de réparer un dommage causé par l'objet de l'opérateur. Ce recours est plafonné quant à son montant (10% du chiffre d'affaire ou du budget annuel de l'opérateur), sauf s'il est démontré que l'opérateur n'a pas respecté les conditions applicables à l'autorisation qui lui a été octroyée ou qu'il a agi sans autorisation.
Le dommage pris en compte est tout dommage corporel ou matériel causé par l'impact de l'objet à un autre objet, à un bien ou à une personne.
Traités des Nations Unies sur l'Espace: traités adoptés dans le cadre des Nations Unies et régissant les activités des Etats dans l'espace extra-atmosphérique. Il s'agit de cinq traités conclus entre 1967 et 1979. La Belgique est partie à tous les cinq :
Jean-François Mayence
Service juridique